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la précarité du sage ou comment conserver la tranquillité de l'âme dans les remous d'une vie flottante ← articles plus anciens 26 avril 2018 une recension de mon livre sur fabula lorsque j’arrive (en retard) à la résidence de france, l’ambassadeur me présente à l’écrivain olivier rolin qui passe quelques jours de vacances en oman. il sursaute quand il entend mon nom : « je viens de lire une recension de votre livre sur internet. il y est dit que c’est dommage de lire un livre sur la littérature de voyage qui ne parle pas d’olivier rolin. » je suis un peu confus, mais c’est vrai que je n’ai pas désiré faire une place particulière à ses récits dans mon livre. j’assume en rougissant. je lui demande ensuite où il a lu cette recension. « un site que je ne connais pas, dit-il : fabula . » fabula ? il y a un article sur mon livre dans fabula ? publié dans sagesse précaire | 2 commentaires 13 avril 2018 mon coup de foudre je l’avais entrevue dans des couloirs ou des bureaux, j’avais vaguement aperçu un sourire charmant, on m’avait dit que c’était la nouvelle prof d’allemand. un jour, j’étais seul à mon bureau, une collègue de la section d’allemand vient frapper à ma porte : « guillaume, je te présente notre nouvelle collègue. » j’ai vu entrer dans ma vie un ange, une lumière, une énergie. ce dont je me souviens, ce n’est pas son visage ni son allure. ce qui m’a frappé, c’est la taille de cette femme : je l’ai vue comme un grand corps, une version augmentée de ce que j’avais entraperçu auparavant. bouleversé, j’ai fait un grand effort pour ne rien montrer de mon émotion. j’ai surjoué le mec indifférent. plus tard, elle me dira qu’elle m’avait cru un peu fou. (plus tard, elle m’avouera aussi qu’elle m’avait pris pour plus con que je ne le suis, pour un type bizarre, pour un homosexuel et pour un loser qui s’habille comme un vieux.) je me suis levé à son approche, lui ai serré la main, elle m’a dit qu’elle parlait français et qu’elle avait fait une maîtrise d’allemand à montpellier. j’ai essayé de jouer le gentleman mi gentil mi lointain, avec un résultat mitigé à court terme. a partir de ce moment, je n’ai eu de cesse de faire en sorte que cette femme devienne au moins une amie. je n’avais pas la folie de songer à une histoire d’amour entre nous, mais d’au moins pouvoir la fréquenter, d’être près d’elle, de passer du temps en sa compagnie et apprendre à la connaître. j’ai donc tout fait pour que nous passions du temps ensemble, et cela a fini par payer. contre toute attente, et avant tout celle de tous les mâles de l’université, c’est moi qu’elle a choisi parmi tous ses prétendants pour partager sa vie. elle avait bientôt trente ans et dieu sait combien d’hommes ont essayé d’avoir ma place lors de ces quinze dernières années. cette rencontre a eu lieu en janvier 2016 et nous nous sommes mariés six mois plus tard. le sage précaire est donc un peu moins précaire d’un pur point de vue sentimental. publié dans femmes , oman | un commentaire 06 avril 2018 l’aqueduc : marcher dans les murs mes promenades dans la palmeraie. la course et la marche entre les champs et sur les chemins d’eau. mon oasis est en effet traversé de voies et de circulations non loin de ma maison, en s’enfonçant dans la palmeraie, une arche se trouve pratiquée dans un mur. longtemps, en me promenant au hasard, je ne prêtais pas attention ni au mur ni à l’arche. longtemps, je me bornais à marcher, à admirer les nuances infinies de vert et, sans me presser excessivement, je gardais en tête l’idée de retrouver plus ou moins mon chemin. ou au moins de me rendre, à force de zigzags rêveurs, sur un sol connu d’où je serais apte à rentrer chez moi. et puis à force, j’ai apprivoisé mon oasis. j’ai appris à me repérer et à observer plus en détail les constructions variées des paysans locaux. dans cette arche, par exemple, j’ai réalisé qu’il y avait un escalier et j’ai décidé de m’y aventurer. j’ai toujours rêvé de parcourir l’intérieur des murs, alors même que je souffre de claustrophobie. ma première nouvelle publiée, dans les années 1990, parlait justement d’un musée d’art contemporain où les murs sont aménagés de telle sorte que l’on puisse y intégrer des haut-parleurs, des objets de toute sorte, voire y faire pénétrer les visiteurs. a l’époque de cette nouvelle, je venais d’être viré du musée de lyon mais j’avais gardé un souvenir merveilleux de mon activité de conférencier précaire. toujours est-il que mes personnages passaient de plus en plus de temps dans les murs. j’essayais de donner une tournure kafkaïenne à cette histoire, preuve s’il en est qu’on ne devrait jamais écrire après avoir été viré. ici, dans cet oasis omanais, ce gros mur de pierre avait certainement une autre fonction que celle de séparer des parcelles de culture. cela devait être une frontière de quelque sorte. encore plus excitant de s’y enfoncer. en haut de l’escalier, une fenêtre permettait de sortir et une nouvelle rangée de marches m’attendaient sur la façade extérieure du mur. en plus de la claustrophobie, je souffre pas mal du vertige, mais j’affrontais mes tremblements pour monter jusqu’en haut. ce que j’y vis me récompensa au centuple du courage dont je fis preuve. sur l’arête du mur coulait une eau fraîche et abondante. le mur n’était pas une frontière mais un aqueduc qui acheminait l’eau de la montagne vers les fermes de l’autre côté de la vallée. le mur était en fait un énorme falaj de pierre, une irrigation millénaire. ce jour-là je n’avais pas de téléphone ni d’appareil pour prendre des photos. celles qui illustrent ce billet ont été prises lors de promenades ultérieures, et c’est pour cela que la photo qui suit montre une eau paresseuse et maigre : l’eau des falaj est minutieusement répartie entre paysans et on voit rarement courir l’eau au même endroit à fréquence rapprochée. j’ai ôté mes chaussures et ai trempé mes pieds dans l’eau tiède et rapide en regardant l’oasis de ce nouveau point de vue. a moitié par sens de l’aventure, et à moitié par peur de descendre par le même escalier, je décidai de marcher dans l’eau pour voir où ce falaj des hauteurs pouvait bien mener. mais cela, je vous le dirai une autre fois. publié dans arabie , architecture , jardin , musée , oman | 2 commentaires 10 mars 2018 la pluralité des mondes au qatar on sait que le qatar subit un blocus de la part de l’arabie saoudite, des emirats arabes unis, du bahrein et de l’egypte. la situation est très tendue depuis plusieurs mois et il paraît que le qatar en profite pour développer des manières de s’en sortir indépendantes. j’en saurai davantage la semaine prochaine car je suis invité par l’ambassade de france à doha pour donner deux présentations, une à l’université du qatar, et l’autre à l’institut français du qatar. intéressante est la façon dont je suis présenté : à l’université, on souligne la venue d’un chercheur docteur en lettres tandis qu’à l’ifq, comme en témoigne la photo ci-dessus, je suis annoncé comme « écrivain voyageur ». a chacun son prestige. publié dans arabie , littérature des voyages , livres , université | un commentaire 10 janvier 2018 la pluralité des mondes les presses de l’université paris-sorbonne ont finalement publié mon livre. c’était en septembre 2017. la joie que cela m’a procuré était profonde, avait commencé avant que je puisse même toucher l’objet, et n’est pas tout à fait éteinte aujourd’hui. j’avais travaillé à ce livre depuis 2008, presque dix ans. le hasard veut que l’usage du monde de nicolas bouvier tombe cette année au programme de l’agrégation de lettres modernes. or, les lecteurs fidèles de ce blog savent ou devinent qu’il y a un chapitre entier sur bouvier dans mon livre. (ce blog a même fonctionné comme un atelier préparatoire à ce chapitre, à bien des égards.) en vertu de ce hasard, la pluralité des mondes est surtout lu par des agrégatifs et des profs de fac qui préparent l’agrég dans les universités de france. le sage précaire déteste les concours, quelle ironie de l’histoire. espérons que c